Wednesday, May 22, 2019

Je sais que c’est faux, mais pourtant je l’oublie! Comment et pourquoi les fausses informations parviennent à nous atteindre ?


Les fausses informations se propagent plus rapidement sur les réseaux sociaux que les vraies informations. Elles sont lues et partagées par de nombreuses personnes. Sur Twitter, les fausses informations ont 70% de chances en  plus que les vraies informations d’être partagées (voir lien: ici). De ce fait, nous sommes constamment exposés à des informations qu’elles soient fausses ou vraies. Il est de notre ressort de distinguer les informations pertinentes de celles qui ne le sont pas. Mais comment nous y prendre ? Quels sont les mécanismes impliqués dans le traitement de l’information ? Mais aussi, comment et pourquoi nous laissons nous tromper par ces fausses informations?  

Réalisé par: Yasmine Salem - étudiante en  graphisme à l'ERG

Afin d’appréhender et d’analyser les informations qui nous sont présentées, nous utilisons la métacognition. La métacognition est définie comme la capacité à penser à propos de nos pensée (Pandty, Briñol, Tormala, Wegener, 2007). Par exemple, lorsque l’on voit une fleur rouge, nous pensons “cette fleur est rouge” ce qui représente nos pensées de base. Mais nous pouvons également aller plus en profondeur et nous demander “pourquoi je vois cette fleur en rouge?”. Nous entrons alors dans la métacognition. Nous réfléchissons sur nos pensées et nous tentons de les expliquer. De même, lorsque nous lisons une nouvelle sur les réseaux sociaux, nous avons des pensées qui nous traversent l’esprit concernant les informations que l’on vient de lire, mais nous pouvons également réfléchir sur ces informations et sur la façon dont nous les percevons.

Cependant, ce processus est très coûteux. Nous avons besoin de temps et d'énergie afin d’analyser l'ensemble des informations auxquelles nous sommes exposés (Fiedler, 2012). Ces informations sont omniprésentes dans notre quotidien animé par les réseaux sociaux. Il s’avère alors difficile, voir impossible, de pratiquer la métacognition et de réfléchir sur l’ensemble de nos pensées provoquées par les médias. Nous fonctionnons donc naturellement par intuition. Nous ne pratiquons pas la métacognition de façon automatique. Dans la vie de tous les jours, nous sommes simplement exposés à différentes informations que nous n’avons pas le temps de vérifier, d’analyser. De ce fait, nous reléguons la métacognition au second plan. Nous ne l’utilisons pas, nous l’oublions même. C’est ce que l’on entend par le terme myopie-métacognitive.

Ainsi, la myopie-métacognitive représente l’incapacité à pratiquer la métacognition. C’est à dire l’impossibilité de réfléchir sur nos propres pensées. De ce fait, la myopie-métacognitive est source d’erreurs de jugement. C’est parce que nous ne procédons pas à l’analyse de l’information que nous développons des croyances erronées.

Fielder et ses collaborateurs (1996b), ont pu mettre en avant ce type de phénomène à travers leurs études. En effet, la simple énonciation d’une information induit la croyance à cette information. A la vue d’une information fausse, les personnes sont capables de la repérer et la qualifier comme étant erronée. Par exemple, ils montrent une vidéo d’une maison contenant des objets. Ils demandent alors aux participants s'ils ont vu une brosse dans la salle de bain. En l'occurrence, dans la vidéo, il n’y avait pas de brosse dans la salle de bain. Les personnes répondent correctement et ils affirment que la brosse n’est pas présente dans cette salle de bain. De ce fait, ils ont réfléchi aux objets présents dans cette salle de bain. Cependant, ils n’ont pas appliqué la métacognition. Ils n’ont pas réfléchi à pourquoi l’expérimentateur leur demande si la brosse est dans la salle de bain. Ils n’apportent pas une analyse de la situation. De ce fait, quand les expérimentateurs ont procédé à une vérification des données et qu’ils ont demandé, une seconde fois, aux mêmes participants si il y avait une brosse dans la salle de bain, les participants ont répondu qu’il y en avait une. Or, cette réponse est fausse. Il n’y a pas de brosse dans la salle de bain. Comment expliquer leur changement de réponse? Les participants ont pourtant répondu correctement à la question dans un premier temps. Pourquoi par la suite, quand on leur repose la même question se trompent-ils?

Nous pouvons l’expliquer par la myopie-métacognitive. Ils ont réfléchi uniquement à l’existence de la brosse et non à l’implication de la question de l’expérimentateur, à savoir, la capacité à distinguer une information fausse d’une information vraie. De ce fait, ils n’ont pas pratiqué la métacognition. Ils ont simplement pris en compte les informations saillante; la présence d’une brosse. Ainsi, les participants ont encodé l’information “présence d’une brosse” et non l’analyse “l’information est fausse”. Ils ont alors retenue uniquement cette information et ils ont oublié qu’elle était fausse.

De cette manière la myopie métacognitive intervient dans le traitement des informations médiatiques, sur twitter, les réseaux sociaux de tout genre. C’est pourquoi nous nous laissons tromper fréquemment par les fausses informations. Elles nous influencent dans nos croyances. Nos erreurs de jugement sont alors fréquentes.

Hammou Mériam, étudiante en Master 1 de Psychologie Sociale et Interculturelle à l'Université Libre de Bruxelles. 
Stage de recherche au CeSCup, sous tutorat d’Olivier Klein et de Régine Kolinsky – 22 mai 2019.

Bibliographie :

Fiedler, K. (2012). Meta-Cognitive Myopia and the Dilemmas of Inductive-Statistical Inference. Psychology of Learning and Motivation, 57, 1-46. DOI: 10.1016/B978-0-12-394293-7.00001-7

Fiedler, K., Walther, E., Armbruster, T., Fay, D., & Naumann, U. (1996b). Do you really know what you have seen? Intrusion errors and presuppositions effects on constructive memory. Journal Of Experimental Social Psychology, 32(5), 484e511. doi: 10.1006/jesp. 1996.0022.

Pandty, R.E., Briñol, P., Tormala, Z.L., Wegener, D.T. (2007), The role of meta-cognition in social judgment, in Higgins, T., Kruglanski, A. W. (coord.), Social psychology: a handbook of basic principles, 2e édition, New York, Guilford Press, 254–284.

Vosoughi, S., Roy, D., & Aral, S. (2018). The spread of true and false news online. Science, 349, 1146-1151.





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